Grave
Prononcer Grave « à la française ». On m’a déjà repris sur ma prononciation dans Pas (Encore) Vus de mars 2017 🙂 .
Je vais essayer de le pas trop spoiler Grave. Malgré tout, je vais vous donner mon interprétation. Le film étant plus une fable, chacun peut avoir une interprétation cohérente du film et une approche différente, tout en restant juste.
C’est une des forces du film de Julia Ducournau. Pour un premier film, elle donne une bonne leçon à des réalisateurs expérimentés, en piochant dans différents genres et avec l’influence majeure de Cronenberg (ancien médecin, comme les membres de la famille de la réalisatrice).
Julia Ducournau a compris, selon moi, les deux pulsions qui donnent aux films d’horreur de la profondeur.
Eros et Thanatos. La pulsion sexuelle et la peur de la mort. Deux sentiments qui arrivent à la fin de l’adolescence et qui marquent le passage à l’âge adulte.
C’est le cas de l’héroïne, Justine, qui dès le début du film : quitte le nid familial, découvre la vie en société et passe un rite initiatique (un bizutage dans son école vétérinaire).
Etant végétarienne, lorsqu’on la force à manger de la viande, ça la change : physiquement et mentalement.
C’est la perte de innocence, la perte d’une valeur fondamentale et fondatrice du personnage de Justine. Elle commet un pêché « de chair« .
En perte de repères, essayant de calquer son attitude sur celle de sa soeur (elle aussi passée par cette mutation), elle teste ses limites : sexuelles, morales, allant de transgression en transgression.
Jusqu’au cannibalisme : le tabou ultime.
Mais c’est pour moi, une fable qui décrit, avec beaucoup d’outrance le passage à l’âge adulte, à la perte de l’enfance, à la découverte d’un monde hostile et dur.
En cela, le film de Julia Ducournau réussit sur tous les tableaux : le film possède plusieurs niveaux de lecture, tous intéressants. Il est très bien réalisé et très bien joué. Il fait, en quelques instants, parti des films de références, au niveau du cinéma français mais aussi au niveau international.
Je retrouve quelques points de Haute tension d’Alexandre Aja et de The Descent de Neil Marshall (deux films à voir en complément de Grave).
Si le film ne fait pas peur, il provoque l’effroi et un certain malaise, comme un conte fantastique qui vous hantera, plusieurs jours durant.